Le prof qui voulait enseigner

Christophe Brankart a été engagé à la Haute École Blaise Pascal à Seraing (en électromécanique) en octobre 1996. Un temps que les moins de vingt ans, BLABLABLA.

Cela fait donc 28 ans qu’il gare sa voiture dans la rue du bas de S’raing sans savoir s’il la retrouvera le soir (c’est un quartier assez animé, dirons-nous),  qu’il passe la porte du bâtiment peu avenant de la rue Carrière, et qu’il plonge dans l’atmosphère pourtant dynamique et chaleureuse créée par l’équipe de Seraing. 

Christophe a une formation d’ingénieur industriel en nucléaire. Cela lui ouvrait pas mal de portes. Mais il considère que le cuisant échec à un examen de recrutement dans une grande entreprise aura été sa plus grande chance dans la vie.

S’il avait réussi, il ne serait pas devenu enseignant.

Devenir ingénieur n’était pas une vocation en soi, il aimait les maths, l’école avait bonne réputation, des copains qui faisaient la même chose… Les grands choix de vie tiennent souvent à des détails.

Devenir prof en ouvrant une porte

Le voici donc à Seraing, engagé pour donner cours. Une semaine avant son premier jour, le stress l’a envahi. Il a perdu 4 kg, il ne dormait plus, il a même songé à reprendre des études en dentisterie ! Le jour J, il est arrivé à l’avance, tétanisé.

Puis il est entré dans la classe, et la peur s’est envolée : il est devenu prof à cet instant, et pour toute sa vie.

Le premier cours qui lui avait été attribué recelait bien des mystères : il n’avait jamais vraiment vu un capteur, mais il devait évidemment expliquer comment cela fonctionnait. Il s’est très vite adapté, renseigné, formé. La suite a été dans la même veine. Se nourrir de nouvelles matières pour pouvoir la restituer, s’adapter, construire : c’est ça, la passion d’enseigner.

Il a même donné des cours d’anglais, lui qui se moque de lui-même en disant plusieurs fois dans cet entretien « je suis vraiment une brêle* en langues ». Il a décidé d’enseigner les choses en appliquant l’anglais à la pratique professionnelle. L’analyse de matériel, de projets techniques en anglais.  « Les étudiants venaient tous au cours », sourit-il.  Ceci dit, ça a quand même été un soulagement quand il a été remplacé.

*être une brêle est un belgiscisme qui ne se traduit pas

Des cours et des événements

Au fil du temps, la charge de cours de Christophe a été augmentée. Puis, durant quelques années, il a été responsable des relations internationales (très actif en français), puis il a commencé à coordonner les stages, les TFE. Pendant longtemps, il a été l’organisateur du Job Day : le référent entre l’école et les entreprises.

Il a également organisé pendant plusieurs années le concours Mécatronic Contest à destination des écoles secondaires et qui renaîtra, espère-t-il, sous une autre forme.

Depuis cette année, il est aussi coordinateur de la section Électromécanique.  Mais toujours prof, c’est très important. Son idée de la coordination, c’est avancer pour le bien-être de toutes et tous. Ce n’est pas facile tous les jours mais le défi est passionnant.

Tous ensemble, tous ensemble, oui !

Seraing, c’est une équipe qui joue sur un terrain difficile : l’implantation est très isolée de l’épicentre namurois de l’Hénallux, des implantations de la Province de Luxembourg, et souffre d’une concurrence féroce sur un petit territoire. Le match est inégal, mais les joueurs sont infatigables.

Tout est mené en équipe, toujours. Un local à modifier en FabLab ? Hop, quelques  profs s’y mettent, vont chercher des devis, apportent le matériel, mettent en place l’installation électrique. Une info dans les écoles ? Un salon, même très loin ? Il y a toujours quelqu’un qui va se proposer : on connaît l’enjeu. L’enjeu, c’est de rester vivant.

Cette énergie de Seraing est tellement unique qu’elle permet d’attirer un nombre vraiment supérieur d’étudiants par rapport à d’autres institutions beaucoup plus massives.  Les anciens reviennent avec plaisir pour informer les jeunes, assister aux portes ouvertes, boire un coup avec leurs profs. Ils sont fiers de leur école.

En avoir plein la vue et les oreilles

Christophe a une deuxième passion après l’enseignement : assister à des concerts avec des amis. Il va voir entre 15 et 20 concerts par an ! Ça va de festivals comme Werchter, Pukkelpop et Tomorrowland (une « expérience sociologique », dit-il) aux concerts intimistes à l’Entrepôt à Arlon, au SportPaleis d’Anvers pour Depeche Mode, en passant par Moby, Ginzhu, Genesis…

C’est une activité qui, mine de rien, prend du temps. Il faut être à l’affût des tickets, assurer ses déplacements et parfois le logement sur place avec les copains.  Un jour, il s’est retrouvé seul devant les portes de la RockHal (Luxembourg), alors que le concert était au Cirque Royal (Bruxelles)…

Il faut chercher le festival improbable, et avoir surtout une soif de découverte.

Christophe aime aussi les défis : avec 3 de ses collègues de l’Hénallux, il a réalisé l’Oxfam Trailwalker (100 km de marche en 2 jours). Ils sont arrivés en rampant, mais dans leur t-shirt Hénallux ! « Une expérience inoubliable. C’était dur, mais on l’a fait, on s’est motivé les uns les autres. Nous étions tellement contents d’arriver au bout ! ».

Toutes ces expériences sont en lien avec ce qui l’intéresse dans le métier d’enseignant : la curiosité, l’expérience, la découverte, l’évolution, le challenge.

Son métier d’enseignant lui reste chevillé au corps et il ne voudrait changer pour rien au monde.

Alors oui, à la salle des profs, souvent, on trouve que les étudiants ne travaillent pas assez. Que les jeunes d’aujourd’hui n’ont rien dans le ventre. Mais on dit ça depuis des siècles. Et le jour des proclamations, Christophe pose son regard sur eux avec énormément de fierté !

 

Anne-Sophie Vandevoorde

 

 

 

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